mercredi 31 mars 2010

Un autre jour à la BennyCorp

C'aurait pu s'appeler épisode II, puisque ce n'est pas la première fois que je raconte une histoire de ce type. Mais j'avais pas envie donc... allons directement au coeur du sujet.

7h : joie du matin, le réveil sonne. La fatigue est moins là que la veille cependant. Ca c'est parce que je sais que le lendemain, c'est un jour de relâche donc forcément, ça vous donne envie de sortir (un peu) plus vite du lit.

8h10 : je quitte mon appart. En avance : c'est suffisamment rare pour être remarqué. Je file vite au bureau, pour récupérer des papiers... et retrouver des gars avec qui on fait un reportage. Le temps d'imprimer dare-dare la feuille avec le numéro du contact, et je retrouve les trois gars en bas, dans la rue.

9h : encore à l'heure. Mais pas les personnes avec qui on a rendez-vous. On poireaute donc, un peu. Avant de retrouver les hommes qui doivent nous accompagner. Ce matin, le thème de la sortie, c'est "Découvrez les égouts de BennyCity". Une idée qui est partie dans une réunion au bureau, comme ça. Un truc à ne pas faire avec notre petite équipe : plus c'est inattendu, plus on va se jeter dessus. Enfin, jeter dessus, presque : moi, je suis là pour le calage et les interviews. Les gars qui partent à la recherche des tortues ninja, avec un casque de chantier sur la tête, je n'en suis pas. Mais c'est pas grave, il y a de quoi faire.

9h30: Vous connaissiez, vous, le H2S ? C'est un gaz, du sulfure d'hydrogène. On le trouve dans les égouts et c'est mortel. "A Paris, deux gars ont voulu faire un tour dans un égout. Le premier est descendu, il est tombé net. Le deuxième est allé le chercher, il n'est pas non plus remonté. C'est inodore aussi" raconte le technicien. Regard de Dustin Hoffman dans "Alerte" à l'appui. Et ça vient d'où ? "C'est la merde. Elle fermente". Re-Dustin Hoffman. Mais ça le fait un peu moins.

10h15 : les garçons ressortent, pas trop crotteux finalement. Mais bien contents. On file boire un coup, vite fait pour caler le bazar avant que chacun ne reparte de son côté. On zieute la fameuse photo de Une (oui, j'ai encore récupéré l'insigne honneur de sa gestion : en même temps, ça m'arrive trois fois sur quatre en ce moment) : ça le fait bien. On va pouvoir avancer l'esprit léger.

11h30 : retour au bureau. Gestion du tout venant. Déjeuner avec les autres gars du bureau. Rapide. Et calage de l'itinéraire pour le reportage de l'aprem. Sur le coup sans trop y penser, je me dis que je peux traiter ça en trois quarts d'heure montre en main.

13h50 : direction l'autre bout de BennyCity. Au programme : rencontre avec des parents qui ont créé une association pour lutter contre la leucémie après avoir perdu leur fils. "Délicat, mais sujet faisable" disait le mail du boss. J'y vais sans trop me renseigner : je me dis que je sais l'essentiel et que je verrais avec eux. Règle d'or dans ce boulot cependant : quand on ne sait pas, on le dit honnêtement. Mieux vaut avoir l'air idiot et dire que l'on ne sait pas que de feindre que l'on sait, prouvant du même coup qu'on est vraiment un imbécile.

14h25 : j'arrive dans un petit lotissement plein de charme. Derrière un alignement d'immeubles qui se situe au croisement de deux routes bien fréquentées. Et cela, même si le milieu de la journée est maintenant bien passé. Je tourne un peu pour trouver l'entrée. En y repensant, c'est assez saisissant de constater le contraste. D'un côté, le souffle des bagnoles. De l'autre, un calme olympien.

14h28 : je sonne. La porte s'ouvre et je file dans les escaliers. Raté : la porte du rez-de-chaussée s'ouvre. Je souris : "Je crois que j'ai été piégé". Un homme ouvre la porte. Il a des cheveux poivre et sel, et un regard bleu intense. J'entre et je découvre très vite un salon aux murs couleurs pèche. La pièce est vraiment lumineuse, tranquille. Nickel aussi : c'est vraiment très propre. L'hôte me présente sa femme. On s'installe au salon.

14h35 : J'explique le pourquoi du comment : l'article pour le mercredi suivant, la présentation de l'association et de leur histoire. et je rajoute : "ce qui est important, c'est que c'est vous qui battez la mesure. Vous me dites ce que vous voulez et s'il y a des choses que vous ne voulez pas que j'écrive, vous me le dites". En vrai, ce genre de choses (le retour sur des propos) arrive rarement. Mais si c'est le cas, je pèse le pour et le contre, pour arranger les deux parties. Après, je peux faire le forcing pour garder tel ou tel élément mais ce n'est pas si commun au final.

14h45 : le couple me raconte son histoire et clairement, il y a de quoi vous retourner l'estomac. Un petit garçon de neuf ans, diagnostiqué le 31 mars et mort le 9 mai. 34 jours plus tard. Tous les deux ont quarante ans et c'est leur seul enfant. C'est leur première interview : le mari parle et tient plutôt bien le choc. Sa femme, elle, me paraît prête à fondre en larmes. Elle est à côté de moi et je sens le malaise. Je me tourne vers elle et je lui dis que s'il y a besoin de faire une pause, il n'y a pas de problèmes. Elle répond que non. Elle dit que ça ira.
Quand je suis confronté à ce genre de situation, je veux dire quand je suis confronté à des trucs très intimes, je me mets à parler assez bas. Sans m'en rendre compte. Un peu comme si le poids de ce dont on parle écrasait le ton de ma voix...

15h00 (enfin, en gros) : je n'aime pas toujours quand les gens font ça (en tout cas, quand ça tombe au mauvais moment) mais le fait de les entendre parler d'eux m'a donné envie de parler de trucs intimes. Pas pour comparer, absolument pas. Mais pour partager des choses, des impressions.
C'est fou... la femme me fait beaucoup, beaucoup penser à ma mère. Pourtant, toutes les deux ne se ressemblent pas trop. On discute longtemps. De lui, de leur deuil qui ne se fait pas. De leurs projets. Dans la maison, les images du garçon sont partout. Plus tard, je constaterai que sa chambre n'a pas bougé. On peut se dire que leur maison ressemble parfois à un mausolée. Que la mort est peut-être partout là-bas, peut-être depuis trop longtemps. Mais franchement à leur place, vous feriez comment ?
Perso, je n'ai pas de réponse.

16h : je repars en bus. Moi qui suis le spécialiste des coups de fil dans les transports en commun, je ne dessers pas les dents de tous le trajet. Arrivé au boulot, j'en parle avec mes collègues avant de me mettre au turbin.

17h : parfois j'aime prendre mon temps avant de rédiger. Pour laisser les choses se décanter. Pas cette fois. C'est un peu comme s'il y avait pour le coup, un vrai besoin de mettre des mots sur tout ça.

19h : c'est rédigé. Petit coup de fil à une asso en quête de bénévoles, pour finir une page. Et petit coup de bol : le mec répond d'entrée de jeu. Cool. Une petite interview et je peux re-rédiger.

20h : j'ai pas envie de rentrer. C'est rare. Alors je m'occupe de la mise en page du dossier égouts du matin. C'est l'occasion de faire preuve un peu de créativité, de casser les formats et j'aime bien ça. Ca change un peu les idées.

21h30 : je vais rentrer, je traine un peu en ville pour trouver à manger (pas envie de cuisiner).

22h35 : j'arrive chez moi. Sur CineCinema, il y a La Guerre selon Charlie Wilson. Un film avec Tom Hanks que je veux voir depuis 18 mois au moins (et que j'ai loupé au cinéma). Je loupe le début, je déteste ça. Je regarde le film d'un oeil distrait. Je suis crevé, pas vraiment dedans.

0h : je rends les armes : je n'ai plus trop les égouts en tête, plutôt le reste. Pas étonnant que je m'effondre vite fait dans mon lit.

Bien à vous,
Benny


dimanche 28 mars 2010

Yin... Yang, yang, yang

Bon alors voilà :

- J'ai bossé tout le week-end et j'en ai ma claque.
- J'ai des trucs à vous raconter ici-même mais mon PC a chopé un virus
- Je vais devoir poireauter jusqu'à mercredi pour lire "Ma semaine à nous" et tous les autres incontournables à votre droite
- Mon ami humoriste à roulette m'a outrageusement démonté la bouche et du coup, je dois manger mou et froid
- Je meurs de faim
- Je suis en repos lundi et mardi, et j'ai une joli paquet de trucs à faire.
- Je suis à la ramasse : j'ai toujours pas trouvé d'analogie comique autour de la phrase "Je dois manger mou et froid". Et ça m'énerve.
- J'ai pas respecté l'Earth Hour parce que j'étais encore au taf à l'heure en question.

Cependant :

- Il ne fait plus nuit à 19 heures
- Je garde bien la pèche
- Je suis dans une "phase projet" sympa
- J'ai fait une chouette découverte musicale
- Je reviens sur la blogosphère mercredi. Avec un PC purifié comme après un bon gros detox à la miss400.

Je vous laisse avec Laura Marling (Adam, tu dois connaître... ou tu vas aimer) :



Bon début de semaine,
Bien à vous,
Benny

mercredi 24 mars 2010

Bringing out your dead songs

Décidément, ce mois-ci, les disparus aiment se faire entendre. Après Johnny Cash (on en parlait il y a quelques jours ici même), c'est au tour de la discographie de Jimi Hendrix de nous réserver une petite surprise. Valleys of Neptune regroupe des enregistrements datant de 1969, entre Londres et New York, un peu avant que l'artiste ne file à Woodstock et entre, du même coup, un peu plus dans l'histoire. L'album compile des titres peu connus mais pas vraiment inédits... hormis Valleys of Neptune.
Depuis quelques jours, les fans se divisent autour de ce nouvel album : cette évidente opération commerciale est-elle bonne à remettre dans les placards dont on l'a extirpé ? Tout dépend du point de vue où l'on se place. Si on regarde la discographie de Hendrix, on se dit que Valleys of Neptune fait clairement office de batard dans une famille prestigieuse. Plus encore, c'est le marketing foireux l'accompagnant qui peut agacer : raconter que ces titres sont tous inédits, c'est se foutre de la gueule de l'acheteur en ajoutant la carotte collector devant son nez.



Mais c'est aussi l'occasion de rappeler que l'homme multipliait les enregistrements alternatifs de son oeuvre : celles qui ont été sélectionnées sont bien fichues et ça donne plutôt envie de revenir aux bons vieux classiques. On appelle ça une oeuvre mineure, un peu hypocrite (lire chère... surtout pour ce que c'est, quand même), mais pas désagréable... même si elle pourrait quand même donner envie aux puristes de s'arracher les cheveux.

Bien à vous,
Benny

lundi 22 mars 2010

Et la surprise, bordel !


C'était il y a une quinzaine de jours. Une invitation de sortie tout ce qu'il y a de plus banale, sauf que ça faisait un joli petit bout de temps que ça ne m'était pas arrivé cet hiver (rapport à un emploi du temps assez lourd en ce moment). Et vous savez quoi : ça fait fichtrement du bien. Genre ET l'extraterrestre qui est récupéré par le vaisseau-mère. Ou un truc du même goût, voyez.
Avant de revenir à BennyCity, j'ai travaillé dans une autre ville où on sortait pratiquement deux soirs sur trois, ce qui ne nous empêchait pas de faire le métier le lendemain. Je me disais à l'époque que je profitais des années de fac que j'avais pas vraiment eues (pas de voiture, mais vie chez papa/maman pas très loin de la fac mais pas trop près non plus) en faisant deux choses :

1/ Relancer activement le commerce de la patate dans cette contrée (ah, la vodka-pomme...)

2/ Faire tout un tas d'âneries sans pour autant aller trop loin (ben oui, j'avais plus 18 ans, donc j'avais un peu plus de plomb dans la tête... et je ramènais pas mal de soiffards incapables de conduire chez moi).


Méfions-nous (un peu) du planning...

Cette sortie, ça m'a rappelé ce temps pas si lointain. Pas dans le sens "Han, c'était mieux avant...", non. Plus en me faisant dire "t'es con, faut remettre ça plus souvent". L'idée me plaît, et du coup je ressors plus dans des proportions raisonnables. Lire : "un peu limitées". A cela deux raisons : je suis entouré de couples très pépère (sic transit gloria mundi) et je trouve qu'à la BennyCorp, on a plus de boulot qu'il y a quelques années. Il faut l'avouer : le diktat de l'agenda, on dirait pas mais c'est aussi subtil que pervers.
Ce qui me fait parler de diktat de l'agenda ? Une discussion avec une de mes amies toute jeune maman (oui, je termine tout juste une phase "Mon dieu, toutes mes amies tombent enceintes : aurais-je des vertues fertilisantes pour les couples alentours ?"). Alors qu'elle trouve tout juste ses marques avec son bout de chou, elle m'a annoncé : "non mais le souci, c'est qu'au fil des années, je perds mon insouciance. Je planifie, je multiplie les listes et les plannings... et ça me plaît moyen : je sors mais je ne lâche plus tout à fait comme avant".

L'âge insouchiant ?

Je dois dire que ça m'a fait réflechir. Est-ce que plus on avance dans l'âge, plus nos plannings, souvent structurés par nos impératifs pro et autres, limitent les occasions où l'on peut profiter du moment présent ? Avec un bébé sur les bras, mon amie va embrasser de nouvelles responsabilités. Pas sûr qu'elle soit encore moins insouciante... Tout ça, je le redis, me fait en tout cas cogiter. Un peu. Et c'est pas foncièrement négatif, il me semble. Surtout si ça me fait nager un peu à contre-courant et ne pas subir les choses. L'idée maitresse étant : laissons un peu de place à la surprise.

Bien à vous,
Benny

vendredi 19 mars 2010

Vracorama de mars : et en musique, s'il vous plaît !

Bonjour les gens,

C'est la guerre et c'est de saison. Au boulot, je veux dire. Comme à chaque fois quand arrive le printemps depuis deux ans, le planning de la BennyCorp c'est un peu comme faire du taureau mécanique en ne portant qu'un slip plein de glue. Traduction 1.0 : ça secoue, c'est long et ça n'en finit pas. Mais je vais bien.
Car oui, le moral est là (ça c'est parce qu'en ce moment, moi et mon taureau, on sort quand même. Ouais). Et quand j'aurais un tout petit peu plus de temps, promis, je vous raconterai tout ce que j'ai dans mes cartons bloggesques. Peut-être même ce week-end. Soyons fous.
Sinon... c'est la guerre et c'est de saison. A peine a-t-on fini de trembler pendant un hiver long et froid, à peine le soleil refait-il franchement son apparition que mon nez se liquéfie. Traduction 2.0 : je fais maintenant une p(censuré) d'allergie au pollen je crois. Ce qui, avant l'année dernière, ne m'arrivait jamais.
Ah. Tchoum.
Je déteste BennyCity. Et les pollen. Et les taureaux mécaniques.

A part ça, en ce moment, je regarde ça :



Franchement, c'est un pur générique. Je le savais mais je pense que c'est l'un des meilleurs de la décennie passée. Avec celui-là :



Et je rajouterais, à titre perso, celui-là (la fin est mal coupée, sacrilège !) :


Rescue Me - Generique
envoyé par CASEYS. - Découvrez des vidéos faites entre amis ou en famille.

[EDIT 13h33] J'avais oublié celui-là dis donc...



Je vous aurais bien mis un pur bijou aussi, celui de Murder one, mais impossible de le retrouver sur ToiTube. Déception.
Et vous, vous avez un générique préféré ?

Bien à vous,
Benny

jeudi 11 mars 2010

L'album de mars : "American VI : Ain't no grave" (Johnny Cash)

Revoilà l'homme en noir. Alors que l'on pensait que sa discographie ne réserverait plus forcément de surprises, voilà qu'un album posthume atterrit dans les bacs près de sept ans après sa disparition. Opération commerciale ? Sûrement, mais en la matière on a vu (et surtout entendu) bien pire.
Comme beaucoup, j'ai découvert Johnny Cash après sa mort, grâce à un pote et, ô surprise, grâce à une série télé. Le prologue d'un épisode de Third Watch pour être précis, illustré par sa reprise de Hurt de Nine Inch Nails. C'était bien avant que le titre ne soit repris par une pub. Avant qu'il ne devienne un des hymnes de cette génération qui a découvert Johnny Cash presque trop tard, entre réédition de sa discographie et biopic pas trop mal de James Mangold.
Mieux vaut tard que jamais cependant, parce qu'à l'heure où de nombreuses formations saturent nos oreilles d'une pop folk douce-amère mais sans vraie émotion, American VI vient en remontrer à un bon nombre de compositeurs d'aujourd'hui. Ne serait-ce qu'avec Ain't no grave ou la reprise de Redemption Day de Sheryl Crow.

Notes entre ombre et lumière

Cet album a été enregistré quelques mois avant la mort de Cash, juste après celle de la femme de sa vie, June Carter : il porte en lui le souffe fragile d'un homme qui arrive au bout de sa vie passée entre ombre et lumière. S'il n'est plus l'icone de Folsom Prison Blues, il porte encore en lui cette énergie assez particulière, qui fait que le gars inspire encore le respect. Même aux portes de la mort, Johnny Cash est encore au-dessus de bien des artistes.



Peut-être ai-je du mal à dissocier ce disque de ce contexte crépusculaire, mais j'ai vraiment l'impression que fond et forme sont ici solidement noués. Tout cela nous donne un album tour à tour sombre, léger, grave et rythmé. Une création pleine de vie. Rien d'étonnant car, comme l'artiste le dit "There ain’t no grave/Can hold my body down".
RIP, Mr Cash.

Bien à vous,
Benny

lundi 8 mars 2010

Le DVD de mars : "Redacted"

Samarra, Irak. Une compagnie de GIs a pour mission de garder un barrage à l'entrée de la ville. Objectif : contrôler les allers et venues, rassurer les populations par leur présence, limiter le nombre d'attentats terroristes. Tout cela dans la défiance générale, alors que leur état-major ne cesse de repousser le moment où l'équipe en place sera relevée et qu'ils peuvent être pris pour cible à tout moment. Pour ces jeunes Américains issus de multiples horizons, le temps est long. Très long et les nerfs sont mis à rude épreuve.
Jusqu'à ce qu'un de leurs chefs ne meure dans un attentat. Jusqu'à ce que les éléments les plus incontrôlables de la troupe partent une nuit en ville (une nuit en vrille, ça marche aussi) pour mener une épouvantable expédition vengeresse...

Quand les images combattent...
Histoire fictive inspirée de faits réels, Redacted est unanimement décrit par les observateurs comme un film expérimental de Brian De Palma. Datant de 2007, porté par un casting d'acteurs méconnus, il tient sa particularité dans le fait qu'il s'agit d'un long-métrage qui s'intéresse à deux guerres : celle qui se déroule sur le terrain et celle que l'on déverse sur les écrans. Film amateur de soldat, reportage de la télé saoudienne, vidéos terroristes sur le net, chats sur le web, caméras de surveillance, documentaire tourné par deux Français... tous les moyens modernes qui offrent un point de vue sur la guerre sont au service de cette histoire, pour multiplier les points de vue et rendre compte d'un terrible drame.

"La guerre c'est mal", par Brian De P.
L'idée est bonne : l'histoire est forte et le parti pris narratif a de quoi rendre la complexité de la situation. C'est en tout cas ce que l'on serait tenter de penser. Le problème, l'ENORME problème, c'est que De Palma, cinéaste qui a brillamment mis en scène la thématique du point de vue dans des films comme Body Double ou Snake eyes, se plante cette fois dans les grandes largeurs.
Tout simplement parce qu'il est incapable de trouver la bonne articulation entre le fond et la forme. Et qu'il est surtout incapable de laisser vivre son histoire, de laisser mûrir l'émotion. La multiplicité des points de vue "techniques" (images du web, film amateur, reportage) fait finalement plus office de collage/barrage qu'autre chose.

L'avis de Brian
Trop obnubilé par sa volonté de poursuivre le réel, de lui coller au train comme une voiture de flics filerait un suspect, il en oublie un axe cruciale du film de fiction : il doit émouvoir le spectateur. Or là, ça ne marche pas. La faute à un script insuffisamment fouillé sans doute... mais aussi et surtout à un réalisateur arc-bouté sur sa volonté de dénoncer la situation américaine en Irak. A plusieurs reprises, on voit arriver De Palma à des kilomètres avec ses grosses rangers pour dénoncer les exactions de l'armée US. Et comme il le fait de manière parfois carrément balourde (les extraits du documentaire français sont ratés, pour ne pas dire consternants), la pilule ne passe pas.



C'est dur d'écrire ça quand on aime vraiment le cinéma de De Palma, mais c'est ce que j'ai ressenti devant ce film. Et ce n'est pas le documentaire De Palma Reloaded consacré à la sortie du film et à la volée de bois vert qu'il a ramassé aux USA qui a arrangé les choses. Confronté à une réaction épidermique de l'opinion (qui a pris pour argent comptant le propos de cette fiction, argh), le réalisateur s'est enfermé dans un discours le confortant dans la position assez stérile de l'artiste incompris (qui rappelle parfois celle de l'ado fatiguant, faut bien le dire). Il faut dire, à la décharge de l'intéressé, que Redacted a été primé en Europe, ce qui ne peut que le conforter dans cette idée sans doute.
Il n'empêche : l'essai est loin d'être transformé. Très loin.

Bien à vous,
Benny

samedi 6 mars 2010

Clip, clip, clip hourra : "Come as you are" (Emilie Simon, 2006)

Alors voilà : normalement, c'est une série consacrée aux clips. Là, c'est un extrait de concert (le live à l'Olympia, qui date de septembre 2006) et c'est une reprise de Nirvana. Normalement, la vidéo doit bluffer par sa mise en images, ses partis pris visuels. Là, c'est très dépouillé, avare d'effets tape-à-l'oeil. Normalement, ça ne devrait pas être là
Oui, mais voilà... avec cette performance, il se passe un truc envoûtant. Charnel. Puissant.
Je vous laisse en juger sans plus tarder... et la reprise est chouette.



Bien à vous,
Benny

jeudi 4 mars 2010

Six Feet Under (saison 1) : il y a une vie après les morts

C'est sans doute une première. En achetant le coffret de l'intégrale de Six Feet Under, j'ai redécouvert la saison 1 que j'avais vu pour la première fois en 2002... sans aller plus loin. Non pas que je n'avais pas trouvé ça bien, c'est juste que je n'avais pas accroché plus que ça, et que je m'étais très vite dirigé vers d'autres séries.
Depuis à peu près deux ou trois ans, je savais cependant que je devais y revenir. Parce que j'étais quand même un peu curieux de découvrir la suite et que, à force de lire des avis et des chroniques enthousiastes dont j'apprécie les goûts, je me devais de lui donner plus d'attention.
Ce que j'ignorais en revanche, c'est qu'une vraie petite surprise m'attendait. Parce que ce revisionnage, cela aura été surtout une authentique redécouverte.

Des croque-morts dans la Cité des anges
Mais revenons-en au début. Pour ceux qui ne connaîtrait pas encore le show de HBO, on rappellera que Six Feet Under, c'est la chronique de la famille Fisher, qui gère une petite entreprise de pompes funèbres dans la Cité des anges et qui doit faire face à la disparition du patriarche, Nathaniel, Sr.
Chronique intimiste pleine de vie (et d'humour), la série déroule les heurs et bonheurs d'une mère et de ses enfants qui ont l'habitude de vivre dans l'ombre des familles frappées par le drame et qui se sont éloignés les uns des autres. La disparition du père Fisher ramène au bercail Nate, le fils aîné, qui n'a jamais été particulièrement à l'aise dans l'univers funéraire. Nate qui, le jour de la mort de son père, a rencontré une femme aussi unique que haute en couleur : Brenda Chenoweth.
Ces événements vont sacrément secouer le quotidien de cette famille de croque-morts, dont les membres vont réapprendre à vivre ensemble... et à vivre tout court.

Retour de femmes
Ce qui est vraiment très frappant, dans cette première saison, c'est l'extrême qualité des portraits de personnages que découvre le spectateur. Et je dois reconnaître que lors de la première vision, j'étais quand même bien passé à côté.
Si le personnage de David (le fils cadet, dévoué à son métier mais déchiré entre sa foi et son homosexualité) était évidemment incontournable, si celui de Nate m'avait vraiment séduit (c'était mon préféré), je dois dire que je n'avais pas saisi la finesse de la description des trois femmes de la série : Ruth (la mère), Claire (la petite dernière) et Brenda. Pourtant, elles sont carrément bluffantes.
La première doit reconstruire sa vie après la mort de son mari, et elle aussi touchante que drôle. La deuxième est une ado un peu à part mais pas tant que ça, et c'est vraiment un personnage crédible. La troisième, enfin, est une femme complexe et l'histoire d'amour qui se tisse entre Nate et elle, est vraiment belle : elle renouvelle le genre plutôt efficacement mais ne laisse jamais les paradoxes de l'émotion en chemin.
Tout ça pour dire que j'ai vraiment aimé cette séance de rattrappage : j'ignore si c'est parce que les thèmes du show d'Alan Ball et leur traitement me parlent plus aujourd'hui que quand j'avais 24 ans mais j'ai plutôt hâte de continuer sur ce visionnage.

Et vous, ça vous est déjà arrivé de vraiment redécouvrir une série (ou un film) que vous aviez modérément apprécié au premier coup d'oeil ?

Bien à vous,
Benny

mercredi 3 mars 2010

"Into the wild" : l'odyssée trouble d'Alexander Supertramp

C'est l'histoire d'un môme. Epris de grands espaces et d'aventure, Christopher McClandess a un jour décidé de tout plaquer. Ses parents, sa soeur, son avenir qui s'annonce doré, ses économies qu'il avait longuement constituées. Tout ça pour prendre la route, et surtout se confronter à la nature. Son eldorado est blanc, froid, impitoyable : c'est l'Alaska.
Sur sa route, endossant l'identité d'Alexander Supertramp, il va croiser toutes sortes de personnes : un couple de hippies hanté par le passé, un agriculteur plutôt fantasque, une ado qui tombe sous son charme, un vieil homme qui aurait pu fonder une famille... plusieurs d'entre eux le questionneront sur son propre passé mais ce n'est qu'au bout du chemin qu'il comprendra qui il est.

Un film à part
Franchement, au moment d'écrire cette chronique (la centième référencée dans la catégorie critique !), j'étais plutôt emmerdé. Parce que ce film a suscité chez moi des impressions vraiment très paradoxales. En premier lieu parce qu'au départ, son héros, je l'ai un peu pris à rebrousse-poil.
Dans son script, Sean Penn se plaît effectivement à mêler dès le départ des éléments qui nourrissent des sentiments opposés. L'inquiétude d'une famille, l'exaltation du voyage à travers des contrées sauvages, les confidences partielles et partiales d'un garçon sur ses parents qui ne laissent pas complètement voir ce que sont les liens qui lient sa famille... les données s'enchaînent, et font souvent naître des émotions contradictoires.
Quand McClandess devient Supertramp, il réalise le fantasme d'un certain nombre de personnes : il assouvit un désir égoïste, celui de changer d'identité pour construire librement son existence et vivre plus intensément. Tout cela, il le fait avec jusqu'au-boutisme, de manière paroxystique. Au point d'en devenir agaçant, pour ne pas dire peu enclin à l'écoute et même... prétentieux.

Noir ou blanc, face au monde vert
La particularité de ce film cependant, c'est de montrer que son héros ne fait pas forcément cela de manière consciente. Aussi féru de livres et de connaissances soit-il, il fonctionne beaucoup à l'instinct.
Un peu comme une bête blessée peut-être, qui juge parfois les autres sans pitié : c'est en tout cas ce que laisse à penser l'évocation progressive de son enfance, laquelle ressemble un peu à un champ de bataille pour deux adultes qu'à autre chose.
En fait, dans sa quête d'ailleurs, Supertramp a une vision assez binaire des choses. C'est ce qui lui permet d'avancer encore et toujours vers son objectif (il ne lâche jamais son but : son opiniâtreté fait sa force) mais le place forcément hors du monde. Il laisse derrière lui des gens qui peuvent l'aider à faire face à la complexité des relations humaines et de ses propres émotions. A commencer par ses propres parents. Ces derniers, confrontés à l'angoisse de l'absence, vont effectivement faire un tout autre chemin, bousculant l'image que l'on a d'eux... sans que le principal intéressé n'en ait conscience. Et quand on se met à l'écart, on se retrouve toujours face à l'hostilité de la nature. Impitoyable.



Au bout du compte, on peut dire d'Into the Wild que c'est un film esthétiquement irréprochable : les paysages filmés sont d'une beauté incroyable, la réalisation est magnifique (je crois que la dernière scène avec William Hurt, le père du héros, me hante encore...). On peut aussi dire que c'est un long-métrage porté par la musique d'Eddie Vedder, entêtante et émouvante (ce type joue avec ses cordes comme il joue avec vos tripes) et ce sont tous ces éléments qui concourent à en faire une oeuvre forte.
Mais c'est aussi et surtout un film sur la jeunesse. Dans ce qu'elle a de plus radicale, de plus enthousiasmant comme de plus immature. Et c'est peut-être ce qui explique la singularité des impressions qu'il laisse quand défile le générique de fin.

Bien à vous,
Benny

mardi 2 mars 2010

La petite nouvelle qui ne change pas grand'chose

Les enfants, j'ai passé mon dimanche avec une fille dans les bras et c'était plutôt chouette. Deux mois après l'accouchement de ma meilleure amie, je suis en effet allé rendre visite à la nouvelle petite famille et découvrir le bout de chou (oui, je fais du teasing en bois, c'est bien ça). Première constatation : force est de constater que je n'ai rien perdu de mon succès auprès des bambins.
Notez bien que c'est réciproque : j'adore les gosses. Mais depuis deux ans, c'est différent. Depuis cette époque où il y avait une femme et une petite fille proches dans ma vie, je me suis retrouvé assez bête en découvrant qu'un jour, j'aimerais bien être père.

Quand on prend conscience...
Je n'en ai jamais trop discuté avec mes potes, mais la prise de conscience du sentiment (ou du désir, à vous de choisir) de paternité, c'est très particulier. Parce que pendant des années, je n'ai jamais voulu prendre un bébé dans mes bras. Pas à l'aise, peur d'être maladroit, pas de prédispositions particulières pour ça. Quand on est un mec, je crois qu'on pense toujours qu'on a le temps, qu'on verra plus tard.
Et puis un jour, ça vous tombe dessus, comme ça. Vous passez du temps avec un bout de môme et vous trouvez ça super cool. Je crois qu'il n'y a pas de règles en la matière. A chaque personne sa réflexion sur le sujet. J'ai dans mon entourage des gens qui ne veulent pas avoir d'enfant et je crois pouvoir dire que je comprends ça (la pression sociale sur les femmes, en la matière, peut être pourtant carrément hallucinante).
Dans mon cas, je pense que cet éveil s'est fait naturellement. A un moment où je me connais sans doute mieux. Alors que je sais davantage qui je suis et d'où je viens (le fait que je sois encore plus proche de mes parents n'est pas anodin là-dedans).
C'est un peu comme quand j'avais pris conscience, quelques années plus tôt, que si j'avais un certain nombre de doutes me concernant, avec lesquels il fallait composer dans ma vie (ah, la confiance en soi...), j'étais aussi tout à fait capable de soutenir et prendre soin de quelqu'un d'autre (moquez-vous : la formulation est assez neuneu, dawsonesque, mais honnête).

Ne surtout pas faire n'importe quoi
Est-ce que ça se fera, est-ce que ça se fera pas ? La question reste entière. Parce que je préfère finir dans une caravane à élever des serpents en bordure de l'autoroute (oui, il me semble bien avoir déjà utilisé cette image dans un autre billet) plutôt que de tourner autour de femme pour chercher une mère potentielle. Je suis en effet persuadé d'une chose : deux désirs d'enfant ne font pas un couple, deux désirs d'enfant ne font pas une famille.
Alors, aussi sûrement que l'éveil de ce sentiment paternel s'est fait naturellement, j'ai tendance à croire que le fait de fonder une famille doit aussi être naturel. Découler d'un cheminement logique, qui fait que c'est parce que l'on est avec la bonne personne qu'on songe ensemble à avoir des enfants. Ou pas.

Conclusion n°1 : je ne pense pas que j'aurai le nez dans des couches avant un petit moment. Si ça doit se faire d'ailleurs, car rien ne le garantit (si quelqu'un se demande : non, ce n'est pas une formule pleurnicharde vouée à susciter la pitié. D'autant que je ne reste pas seul dans mon coin).
Conclusion n°2 : si un jour on se croise, je ne pense pas que ce sera aux abords d'une école, alors que je serai en train de traquer une éventuelle maman.

Bon sang, pourvu que je ne fasse pas un billet qui contredise cette dernière affirmation...

Bien à vous,
Benny

PS : Oui, la photo c'est bien Bill Cosby. Non, il n'y a pas de vrai rapport. Mais le Cosby show quand j'étais gosse, j'aimais bien.

lundi 1 mars 2010

"Mentalist" : y a fausse manip, non ?

C'est le carton de ce début d'année en France et ceci malgré la diffusion archi-bordélique de TF1. L'audience est là, le public est plutôt enthousiaste et une bonne partie de la critique télé, toujours plus prompte à jouer la carte du consensus, a ressorti le carton d'éloges qu'elle utilise pour chroniquer House. En gros, Mentalist c'est le phénomène du moment.

Une série fainéante
Et en même temps, à froid, il y a de quoi se cramponner aux coussins du canapé. Bruno Heller (Rome) à la production exécutive, Simon Baker devant la caméra (si, si : c'est un bon acteur. Je l'ai vu au début des années 2000 dans The Guardian, c'était très sympa) et un concept pas super original mais solide : ça peut vraiment le faire.
Le pitch : ancien escroc, Patrick Jane a tout perdu le jour où sa femme et sa fille ont été tuées par un serial killer, Red John. Après de longs mois de thérapie, Jane a mis ses dons aux services du Bureau Californien d'invistigation (en gros, le FBI avec C, comme dans "Comment ça, notre idée originale n'est pas originale ?"). Il a désormais pour mission de résoudre toutes sortes d'enquête... et aussi remettre la main sur Red John.
La particularité de Patrick Jane ? C'est un expert dans la manipulation. Doté d'un sens aigue de l'observation, il n'a pas son pareil pour embobiner son monde et lui l'obliger à faire ce qu'il veut.
Enfin, tout ça c'est que l'on nous dit au départ. Parce que Mentalist est une série sacrément fainéante. Alors oui, elle s'appuie sur un casting efficace, il y a une vraie dynamique de groupe qui sert bien le personnage central du show. Mais la vérité, c'est que les intrigues de cette série, qui alterne épisodes mythologiques (l'affaire Red John) et Loners (ces histoires bouclées en un seul épisode), sont souvent basiques. Tristement basiques.

C'est sympa mais ça ne suffit pas
Pour jauger toute la force de persuasion de son héros, pour être vraiment bluffé par Jane, il faut que ses adversaires soient ou particulièrement retors, ou que leur psychologie soit finement dessinée (comme cela pouvait être le cas dans les meilleurs épisodes de New York: section criminelle de René Balcer et Dick Wolf). Ici, on a ni l'un ni l'autre. Du coup, les épisodes se suivent sans déplaisir mais il en faudrait plus, beaucoup plus pour retenir l'attention du spectateur.
C'est propre, sympa. Plutôt bien fait. Mais ce n'est ni original ni particulièrement bien écrit. Un cop show comme un autre en somme. Du coup, on est bien loin du phénomène annoncé.
Bruno Heller va-t-il muscler son jeu, corrigeant les défauts de son show ? Ou devra-t-on attendre que l'effet de mode ne s'estompe ? L'avenir le dira mais franchement, moi, je n'y crois pas vraiment.
Pas grave : le phénomène autour du show perdurera. Pendant ce temps, en France, beaucoup de personnes ne savent absolument pas ce que c'est que Friday Night Lights. Mais ça, ce n'est pas grave...

Bien à vous,
Benny